La place de l’art dans la vie politique du Premier ministre albanais



Aurenc Bebja, France – 17 Novembre 2016

 

Le premier ministre albanais est arrivé au pouvoir en septembre 2013 après avoir remporté les élections législatives lors du mois de juin de la même année. Cet orateur hors pair, à côté de son poste de chef de gouvernement, occupe parallèlement et de plus en plus un poste d’artiste contemporain.

 

Pour le plus haut représentant de la politique albanaise, c’est devenu une habitude de mélanger vie professionnelle et vie personnelle. De ce fait, il expose ses œuvres dès qu’une opportunité se présente à lui et peu importe que le déplacement soit à titre officiel ou privé.

 

Cela est arrivé par exemple à Paris en décembre 2014, à la galerie Rhinoceros & Cie, à Berlin en avril 2015, à la prestigieuse galerie d’art moderne de Michael Schultz, à Hong Kong en octobre 2015, à l’académie Jao Tsung et à New York en novembre 2016 (et ceci malgré que le pays soit touché par des inondations importantes), à la célèbre galerie Marian Goodman.

 

Qu’on apprécie ou non son art, il connait un véritable succès, en espérant que ce soit en raison de son talent et non de sa notoriété politique. En revanche, dans celui du chef de gouvernement, cela reste discutable.

 

Malgré l’adoption de la réforme judiciaire (importante pour la lutte contre la corruption) au Parlement avec la collaboration de l’opposition durant l’été 2016 ainsi que l’éventuelle prochaine ouverture des négociations pour l’adhésion de l’Albanie à l’Union Européenne (dont la réforme judiciaire était une condition), son mandat politique, qui prendra fin en juin 2017, reste mitigé en raison des promesses électorales non tenues et de la dégradation socio – économique du pays.

 

Dès le départ, ces promesses, nécessaires et cruciales pour les citoyens albanais, sur le travail (la création de 300 000 postes d’emplois en quatre ans) et sur la santé (soins gratuits pour tout le monde) étaient vouées à l’échec en raison de la démesure des propositions. Pour autant, les citoyens ont eu espoir en lui et l’ont cru, mais ils ont fini par comprendre que tout ce qu’on leur a promis, ce n’était que du vent.

 

Quant à la dégradation socio – économique du pays, il s’agit en fait du chômage (avec un taux dépassant les 30 % chez les jeunes) et de la précarité (selon la Banque Mondiale, en 2016, 45.5 % de la population albanaise vivrait avec 5 dollars/jour), qui ont incité et incitent toujours certains citoyens soit à quitter le pays pour aller demander l’asile ailleurs (souvent en Europe Occidentale) ou soit en se lançant dans le travail illégal, et plus précisément dans la culture de cannabis.

 

L’Albanie se trouve depuis deux ans dans une situation inquiétante qui continue de s’accentuer. Le cannabis pousse partout dans le pays, mais le gouvernement « dessiné » par le Premier ministre artiste semblerait être incapable de maîtriser et de mettre fin à ce travail illégal et dangereux. A moins que la culture de cannabis fasse partie de la proposition de création de 300 000 postes d’emplois ?!

  

Après ces constats, l’art du Premier ministre contribue à faire parler de l’Albanie. Tout de même, sa mission principale est celle de gouverner une société en transition, un pays aux portes de l’Union Européenne, dont les gens se battent au quotidien pour survivre, pour subvenir à des besoins primaires. Il parait alors nécessaire d’utiliser son poste politique non pour donner un élan à son art personnel, mais plutôt d’essayer de trouver des solutions pour redresser le pays.

 

 

Billet publié également sur Mediapart :

https://blogs.mediapart.fr/aurenc-bebja/blog/171116/la-place-de-l-art-dans-la-vie-politique-du-premier-ministre-albanais